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Les techniques de l’illusion

A travers toutes les époques de l’humanité, l’homme a toujours cherché à créer l’illusion, par plaisir et pour se divertir. Le chapitre suivant passe en revue quelques-unes des techniques et moyens employés. 

Trompe – l’œil

Comme son nom l’indique, la technique en trompe-l’œil a pour but de créer une illusion optique. Il s’agit d’un style de peinture qui s’apparente au photoréalisme. On retrouve cette technique sur les peintures murales ou de plafond. Elle permet d’obtenir une illusion architecturale saisissante en peignant en trompe-l’œil éléments architecturaux, paysages ou sculptures. Pompéi en est l’exemple le plus ancien.   

Le style en trompe-l’oeil se développe à la Renaissance et va de paire avec la découverte de la perspective et les progrès de l’optique. Depuis le 14e et 15e siècle, on essaie d’apporter aux espaces fermés une ouverture sur l’extérieur en peignant de fausses fenêtres et des coupoles dont le but est d’agrandir l’espace.  

Dans la peinture liturgique, l’apogée du trompe-l’œil commence avec la contre-réforme (16e siècle). Les coupoles maniérées (exagéré, artificiel) des églises jésuites représentent l’ascension de Jésus ou de Marie, ouvrant ainsi le ciel. Durant la période Rococo (1720 – 1780) les représentations s’éloignent de la religion et abordent les thèmes classiques de l’Antiquité, par exemple la représentation des Dieux.  

Aujourd’hui, le trompe-l’œil est toujours utilisé dans l’aménagement des espaces intérieurs mais il est surtout repris par l’industrie c

1. Historique

Les principes optiques fondamentaux sont décrits dans des textes chinois datant du 5e siècle avant Jésus-christ.  

Dans les cercles culturels occidentaux, la découverte de la projection de l’image à travers une ouverture se fait à peu près à la même époque. Au 4e siècle avant Jésus-Christ, Aristote décrit des apparitions qu’il ne peut expliquer. Il constate que la lumière du soleil qui passe à travers une corbeille projette sur le sol l’image des ouvertures par lesquelles elle passe. En observant l'image d'une éclipse projetée sur le sol à travers le feuillage d'un arbre, ildécouvre que les minuscules espaces entre les feuilles projettent sur le sol l’image du soleil.

Il faudra plusieurs siècles pour comprendre ce phénomène. La première pierre sur ce long chemin est posée au 10e siècle par des savants arabes qui découvrent que la lumière se diffuse en ligne droite. Ils en arrivent à cette conclusion après avoir réalisé des expériences dans lesquelles ils projetaient la lumière de trois bougies dans un petit trou. Les images ainsi créées pouvaient être reliées aux images originales par une droite imaginaire.  

Dans les siècles qui suivent, les moyens de réfléchir la lumière par un petit trou sont principalement utilisés par les astronomes pour l’étude de la lumière du soleil et par les artistes comme instrument d’étude de la perspective. Les plus connus sont Léonard de Vinci et Albrecht Dürer.

Vinci est le premier à étudier en détail le phénomène de la camera obscura: "Lorsque la façade d’un bâtiment, ou une place, ou un paysage, est éclairé par le soleil et que l’on perce un petit trou dans le mur d’un appartement situé en face et non éclairé par le soleil, tous les objets éclairés projetteront leur image à travers cette ouverture et apparaîtront inversés". Le principe de la chambre noire est désormais appliqué dans de nombreuses situations. Le mathématicien et astronome italien Toscanelli par exemple, fixe en 1475 un anneau de bronze percé d’un petit trou dans l’une des fenêtres de la cathédrale de Florence. Par beau temps, l’image du soleil se projette sur le sol de la cathédrale. En apposant une marque à l’heure de midi, il est ainsi possible d’indiquer le temps. Cette installation est toujours visible.  

Une installation similaire est utilisée en 1580 par l’astronome papal pour prouver au pape Grégoire XIII que le jour et la nuit au printemps sont de même longueur le 11 et non le 21 mars. Ceci aboutit à la célèbre réforme du calendrier grégorien.    

Au 16e siècle apparaissent deux types de chambres noires. A côté du modèle connu – une pièce noire percée d’un petit trou dans le mur - utilisée par exemple par Frisius pour étudier l’éclipse solaire, l’astronome allemand Johannes Kepler qui a bien étudié le système de "Camera Obscura" (= "chambre noire") construit une variante en remplaçant le trou par une lentille. Cette lentille projette une lumière plus claire qui ne se reflète d’ailleurs qu’à partir d’une certaine distance. Il est le premier à utiliser une Camera Obscura portative.

Le 19e siècle invente la chambre noire comme divertissement populaire. Grâce à un ingénieux mécanisme rotatif sur le toit et une lentille convexe, il est possible de projeter dans la pièce, sur une surface de projection horizontale, une image circulaire assez claire de l’environnement extérieur.  

2. Technique 

Sur de nombreux points, la photographie au sténopé est comparable à la photographie « normale ». La principale différence réside dans le fait que l’appareil utilisé, respectivement son objectif, ne contient pas de lentille mais une petite ouverture (le trou) qui projette l’image sur le mur. Ce système exige une autre manière d’aborder le travail avec l’appareil (notamment parce que les temps d’exposition sont très longs) et produit des images très différentes de celles prises avec un appareil ordinaire. 

Alors qu’une lentille produit une image en faisant converger sur un point commun tous les rayons lumineux qu’elle capte de chaque point de l’objet photographié, le trou du sténopé ne produit aucun point de convergence. En se juxtaposant, les différents points images correspondant à chaque point de l'objet forment l'ensemble de l'image. Dans l’idéal, le trou serait un point juste assez gros pour laisser passer un rayon lumineux de chaque point de l’objet. Ce rayon lumineux ne toucherait naturellement la pellicule qu’en un point unique. Un rayon lumineux venant d’un autre point de l’objet toucherait donc la pellicule à un autre endroit. La somme de tous les rayons lumineux pénétrant par le trou donnerait une reproduction exacte de l’objet sur la pellicule. Si l’on avançait ou reculait la pellicule, l’image ne serait pas modifiée, seule sa dimension varierait en fonction de la distance par rapport au trou.  

En réalité, le trou n’est bien entendu jamais un simple point. Plusieurs rayons lumineux parviendront de chaque point de l’objet photographié et apparaîtront sur la pellicule. Le faisceau lumineux varie en fonction de la grosseur du trou. C’est l’une des raisons pour lesquelles les photos prises au sténopé sont toujours un peu moins nettes que celles prises avec un système de lentilles. La seconde raison est l’apparition de distorsions sur les bords du trou, faisant dévier de leur trajectoire les rayons lumineux passant juste au bord du trou.  

Étant donné qu’il n’y a pas de point de convergence, une photo prise au sténopé présente une netteté régulière sur toute la surface de l’image. En d’autres termes : contrairement à un objectif à lentille, le réglage de la profondeur est illimité. Toutefois, à cause de la divergence des rayons lumineux se posant sur chaque point de l’objet, les objets très près (distance objet-trou inférieure à distance trou-pellicule) sont flous.

La lanterne magique

La lanterne magique inventée au milieu du 17e siècle, probablement par le physicien néerlandais Christiaan Huyens (1629 – 1695) est l’ancêtre du projecteur de diapositives. Les principes de cet appareil de projection sont exposés dans l’oeuvre d’Athanisius Kircher: “L’art de la lumière et des ombres (Ars magna luci set umbrae)”.

L’artiste et mathématicien danois Rasmussen Walgenstein est le premier à utiliser le nom de “Laterna Magica” vers 1665. Au début, les artistes projectionnistes peignent ou font peindre les images de la lanterne. La lanterne magique est installée de manière à rester invisible pour le spectateur. La fumée est souvent utilisée comme surface de projection, créant ainsi l’impression que les personnages flottent dans la salle. C’est avec ces apparitions fantasmagoriques que la lanterne magique s’est établie comme un média de divertissement professionnel dont l’apogée arrive fin 18e, début 19e. A cause de l’effet provoqué par ces projections, elle est également connue sous le nom de « lanterne effrayante ». Au 19e siècle, on montre de plus en plus d’histoires, de contes et d’effets visuels intéressants. Mais on propose aussi au public des sujets religieux et scientifiques. Avec la révolution industrielle du 19e siècle, la lanterne magique devient un média de masse. Lanternes et séries d’images font l’objet d’une production de masse bon marché, les nouvelles formes de distribution et un système étendu de location contribuent à une large diffusion des produits industriels. Certaines entreprises aux catalogues fournis proposent des appareils de projection et du matériel photographique. Faisant l’objet d’une production de masse, la lanterne magique est désormais accessible à toutes les bourses et entre dans les foyers comme média de divertissement.  

A partir des années 1830, la part belle est donnée aux appareils constitués de plusieurs unités de projection (appareils à deux ou trois objectifs positionnés côte à côte). Ce système permet de réaliser des fondus enchaînés d’images (pour créer des images flous par exemple).  

Bientôt, les procédés photographiques de reproduction technique des images font leur apparition à côté des images peintes. En 1890, la dégradation progressive de la qualité des images projetées et reproduites en masse ainsi que celle des spectacles déclenche un débat public sur l’avenir de l’art de la projection. L’art de la projection de la lanterne magique perd en importance avec l’apparition et la diffusion des cinématographes à la fin du 19e siècle. Les médias audiovisuels du 20e siècle (film, diapositives) perfectionnent l’art de la projection de la lanterne magique, notamment en ce qui concerne la réalisation des images et la dramaturgie. Les débuts du cinéma sont à présent considérés comme une forme tardive de l’art historique de la projection.

A partir du 19e siècle, la lanterne magique n’est plus uniquement un divertissement mais est aussi employée à grande échelle pour l’éducation et l’instruction publiques et l’information du public dans les secteurs les plus divers. Certaines représentations se consacrent notamment à la géographie, la littérature, le théâtre, les problèmes sociaux (l’alcoolisme par exemple), les sujets politiques ou bibliques. Elles sont organisées par des institutions religieuses ou d’Etat, des organisations sociales telles que les partis et autres groupements politiques dont les intentions sont d’ordre sociopédagogique, religieux ou politique. Dans le domaine de l’éducation sociale notamment, on utilise des séries d’images informatives et narratives pour accéder à une efficacité maximale du message véhiculé. Les mouvements d’éducation populaire ont largement contribué au développement de l’art de la projection comme média de masse.  

L’illusion du mouvement 

À partir de 1840, des jeux d’optique d’un type particulier font leur apparition en Europe: le thaumatrope (prodige tournant), le phénakistiscope ou le stroboscope (roue de la vie) et le zootrope (cylindre magique). 

L’intérêt de la roue magique et du cylindre magique (phénakistiscope et zootrope) est de réunir deux caractéristiques de la perception dont la découverte modifiera durablement l’histoire de la projection: l’effet stroboscopique et l’effet de reproduction. L’effet de reproduction est créé par une stimulation lumineuse qui agit sur l’œil et ne s’efface pas immédiatement. Lorsque la représentation d’un objet sur la rétine est abruptement interrompue par une autre, l’effet perdure un moment. Ce phénomène physiologique de l’œil humain est appelé persistance rétinienne. En revanche, l’effet stroboscopique est suggéré à la conscience du spectateur, il est donc de nature psychologique. L’impression de mouvement est créée par la décomposition de chaque séquence du mouvement image par image, perçues successivement. Ce moment d’illusion est la condition indispensable pour la vision cinématographique, renforcé encore par l’effet d’image consécutive.  

Phénakistiscope (roue magique)

Précurseur du projecteur cinématographique, le phénakistiscope (appelé aussi phantascope, roue magique, fenêtre magique) est une invention de 1832 réussie indépendamment par deux savants, Joseph Plateau à Gent et Simon Ritter von Stampfer à Vienne. Il est constitué d’un disque rotatif sur lequel sont dessinées les séquences d’un mouvement. Lorsqu’il observe la rotation rapide du disque à travers une fente, le spectateur a l’impression d’un mouvement fluide grâce à la persistance rétinienne.

Il s’agit de la première exploitation de la persistance rétinienne pour l’animation d’images dessinées; le phénakisticope a permis l’animation des premières séries d’images calculées.  

Plus tard, William George Horner a amélioré le principe avec son zootrope ainsi que Franz von Uchatius en combinant en 1853 en un seul appareil de projection le phénakisticope et la lanterne magique. A son tour, cette invention est encore améliorée par Charles Emile Reynaud en 1877 avec le praxinoscope auquel il intègre des miroirs et un éclairage. D’autres améliorations ont été faites jusqu’à ce qu’enfin Thomas Alva Edison présente en 1889 le cinématographe et le kinétoscope.

Zootrope (tambour magique)

Le zootrope est une version améliorée du phénakisticope (roue de la vie de 1832). Alors que la roue de la vie utilise un disque pour représenter le mouvement, l’inventeur du zootrope, le mathématicien anglais William George Horner, utilise en 1834 une bande de dessins posée à l’intérieur d’un tambour percé de fentes à travers lesquelles le spectateur perçoit les différentes séquences comme un mouvement fluide lorsque le tambour tourne (créant ainsi un effet stromboscopique). Dans le zootrope d’Horner, le nombre de fentes est égal au nombre de phases du mouvement. Des séquences plus longues peuvent être représentées car il y a plus de place sur la bande du tambour magique que sur la roue de la vie. Le principe du zootrope, jouet optique très apprécié après 1865, est développé ensuite par Emile Reynaud (praxinoscope) et Ottomar Anschütz. Ce dernier ajoute au tambour deux rangées d’ouvertures dont l’une comporte plus de fentes et l’autre moins que les séquences du mouvement. Cette invention appelée « tachyscope » permet au spectateur de voir l’objet ou le personnage représenté bouger sur place ou avancer et reculer. 

Le folioscope

Si dater avec précision les débuts du folioscope est pratiquement impossible, il est en revanche certain que son invention remonte au 19e siècle. En 1824, les recherches du physiologiste Peter Mark Roget lui font découvrir que l’œil perçoit une série d’images fixes de contenu à peu près semblable comme une image animée lorsqu’elles sont projetées en succession rapide. Cette découverte donnera lieu à la construction de nombreux jouets optiques aux noms aussi insolites que traumatrope (1825), phénakistiscope (1832), zootrope (1834), praxinoscope (1877) et mutoscope (1894). Le point commun à tous ces jouets optiques est qu’ils anticipent le principe du cinéma avec des appareillages filigranes complexes et peu d’images. Le folioscope, breveté pour la première fois en 1868 par John Barnes Linnett sous le nom de « kineograph » fonctionne selon le même principe.  

Il est cependant très probable que le principe du folioscope avait déjà trouvé à cette époque les applications les plus diverses, l’utilisation ingénieuse du livre comme médium est en tout cas très ancienne. Les livres magiques existent depuis le début des temps modernes. Après les avoir biseautés et préparés de manière particulière, le montreur peut faire croire au public qu’il fait apparaître certaines pages sans que ce dernier ne comprenne comment. 

Stéréoscopie

La stéréoscopie est l’ensemble du processus de photographie et de reproduction d’images en relief. Le terme stéréo vient du grec « stereos » et signifie solide, sous-entendu à trois dimensions, donc dans l’espace. Ce mot est aujourd’hui employé pour la stéréophonie, donc pour les sons, même si depuis la moitié du 19e siècle c’est un terme utilisé pour la visualisation du relief et que les découvertes sur la vision en relief sont bien plus anciennes. 

Le mathématicien grec Euclide se consacre à la stéréométrie au 4e siècle avant Jésus-Christ. Il savait déjà faire le lien physiologique entre les couples de vues stéréoscopiques et l’impression de vue en relief. Mais l’essor fulgurant de la stéréoscopie date de la moitié du siècle dernier.  

Sir Charles Wheatstone (1802-1875) publie en 1838 les premiers résultats de ses recherches sur la vision en relief. Il calcule et dessine des couples de vues et construit un appareil dans lequel le regard du spectateur est détourné sur les deux moitiés d’images. Il appelle cet appareil stéréoscope, terme toujours utilisé de nos jours. 

En 1849, Sir David Brewster (1781-1868) présente le premier appareil photo à deux objectifs qui permet pour la première fois de photographier des instantanés (single shot) en stéréoscopie. Jusque là, les deux images en stéréo était exposées l’une après l’autre et l’appareil renvoyait latéralement le regard vers deux dessins stéréoscopiques. Il présente également la même année un stéréoscope à prisme avec lequel on peut regarder les prises de vue faites avec son appareil photo.  

En 1851, l’opticien français Jules Dobascq présente ses appareils à l’exposition universelle de Londres. Ses stéréoscopes s’inspiraient des constructions de Brewster. L’engouement du public est immense et la reine Victoria en personne se passionne pour cet appareil. Le sort des images en stéréo est désormais scellé.   

Plus d’un million de stéréoscopes et leurs cartes stéréoscopiques sont vendus en Europe en 1860. Leur succès se prolonge jusqu’au début du 19e siècle ; tous les fabricants renommés d'appareils photo avaient dans leur assortiment des appareils de prises de vue stéréoscopiques.   

Au début du 20e siècle, les images en stéréo n’intéressent plus grand monde. L’emploi par les photographes et les amateurs de la caméra 35 mm et une offre croissante de médias imprimés éphémères plongent la stéréoscopie dans l’oubli. Au fil des années, certains fabricants d’appareils photo continuent de proposer l’un ou l’autre modèle de stéréoscope, sans grand succès.  

Le système View-Master devient très populaire dans les années 50. Une série d’images View-Master se composait d’un ou plusieurs disques comportant chacun sept paires de vues stéréo qui peuvent être regardées successivement avec la visionneuse en tirant sur un petit levier. Ce système existait dans le monde entier et il existait des milliers de séries d’images comme notamment des reportages de voyage, des scènes de films ou des bandes dessinées. Certains fabricants proposaient même des appareils photo pour les pellicules diapositives 35 mm en format View-Master. Avec l’emporte-pièce fourni on pouvait découper ses couples d’images et produire soi-même ses disques View-Master. Le système est vendu jusqu’à la fin des années 60 mais a toujours gardé l’image d’un jouet pour enfant.  

En 1971, l’ingénieur hongrois Dennis Gabor (1900-1979) reçoit le Prix Nobel pour l’invention de l’holographie. L’holographie est un stéréogramme produit par la lumière laser qui reproduit l’objet et ses franges d’interférence sur une plaque photographique. Bien qu’il ait découvert l’holographie en 1948, ce procédé ne devient populaire qu’après avoir reçu le Prix Nobel. Mais les hologrammes n’intéressent que des petits groupes de scientifiques et d’artistes. L’un des avantages de l’holographie est qu’il n’y a pas besoin de visionneur pour percevoir l’effet de relief. C’est donc une technique autostéréoscopique.   

La stéréoscopie reste dans l’ombre jusqu’à la fin des années 80. Elle est redécouverte grâce à l’évolution technique des ordinateurs. Lorsque les programmes informatiques sont en 3D, la puissance de calcul est élevée. A cause du prix élevé des ordinateurs, ceci était réservé à un cercle d’utilisateurs limité jusqu’à la fin des années 80. Les simulations en temps réel sont tout particulièrement exigeantes en matière de matériel mais avec l’amélioration progressive des processeurs, notamment pour les PC, les applications sont de plus en plus en 3D. Ceci est valable au même titre pour les jeux que pour les applications techniques ou scientifiques dans les domaines de l’architecture, la construction de machines, la médecine ou la chimie. Nouveaux logiciels et composants matériels tels que par exemple la carte graphique 3D confirment cette tendance.  

Cette Renaissance est caractérisée par la continuité. Dans l’évolution de la stéréoscopie, ceci n’est que le début d’une nouvelle époque qui ouvre de nouvelles portes à la créativité et réservera encore beaucoup de surprises.  

L’Eidophusikon (petit théâtre mécanique illusionniste)

Son inventeur, le peintre anglais Philip James de Loutherbourg (1740-1812), s’est inspiré de l’eidétique, une faculté à s’imaginer si parfaitement des objets ou des situations qu’ils semblent réels. La scène miniature (1,80 x 2,50m) qu’il ouvre à Londres en 1781 n’est pas occupée par des acteurs mais par des personnages mobiles fabriqués à l’échelle et de véritables accessoires miniatures. Son eidophusikon est un petit théâtre composé d’images peintes transparentes, rendues vivantes par une lumière colorée changeante ; une musique composée par Johann Christian Bach pour l’occasion accompagne le spectacle. Des images transparentes sont utilisées pour représenter les rideaux translucides. L’idée de Loutherbourg est étroitement liée au développement de la scène théâtrale de l’époque et il est permis de supposer qu’il avait assisté aux spectacles de décoration venus d’Italie et donnés en représentation à Paris vers 1755 qui se caractérisaient par un système d’éclairage complexe. Avec cette invention, l’illusion optique atteint alors son apogée car l’eidophusikon accorde une importance majeure aux effets de lumière et de mouvement.    

Le panorama de salon

Le panorama de salon était aussi appelé voyage optique de salon, cosmorama, europarama, voyage européen panoptique ou théâtre universel. Il se composait d’une visionneuse pliable avec laquelle le peintre du panorama voyageait de ville en ville. Les images souvent mises en valeur par des effets d’éclairage pouvaient être observées à travers des verres optiques légèrement grossissants : paysages réalistes peints, villes, phénomènes naturels, scènes avec des hommes de pays étrangers. Les spectacles de petits panoramas compensaient l’absence de vue panoramique par une alternance plus fréquente des images. Le peintre de panoramas Hubert Sattler par exemple disposait vers 1850 de plus de cent images de voyages dans le monde entier.  

Panorama impérial

Le premier panorama impérial est présenté au public en 1880 à Breslau par son inventeur August Fuhrmann. 25 personnes pouvaient prendre place autour du cylindre de bois de 5 m de circonférence. A travers une ouverture, on y voyait des photos stéréo sur verre colorées à la main et éclairées par derrière. Lorsqu’une sonnerie retentissait, l’ensemble du dispositif pivotait à l’intérieur du cylindre, laissant apparaître un nouveau motif. Chaque représentation présentait deux séries de 50 images représentant des contrées exotiques, des bâtiments célèbres ou des événements actuels. Ceux-ci étaient présentés une fois par semaine dans plus de 250 filiales de panorama impérial dans toute l’Europe. Contrairement aux chambres obscures présentées à l’époque dans les kermesses, Fuhrmann considérait son panorama impérial comme un « Institut éducatif de premier rang » dont il faisait la promotion avec succès auprès des pédagogues et des érudits.  

Stéréopticon/cyclorama

En août 1894, Charles A. Chase étonne pour la première fois le public éberlué de Chicago avec une projection de diapositives de type cinématographique : 8 doubles projecteurs projètent sur une toile circulaire les images surprenantes du grand incendie de Chicago. Les 16 diapos pouvaient être changées simultanément et la succession rapide des photos donnait au public l’illusion du mouvement. L’évolution fulgurante de cette technique photographique et cinématographique sonnait la fin des grands panoramas peints. Chase propose alors de peindre en blanc les panoramas circulaires et d’accrocher au plafond une plate-forme de projection. C’est ainsi que les grandes peintures panoramiques qui ne servaient plus pouvaient être réutilisées pour de passionnantes projections de diapositives.

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